Dépistage universel et Trod, la nouvelle stratégie contre le VIH
Législation
Alors que le Conseil d’Etat a annulé mercredi 8 avril un arrêté du 11 juin 2013 fixant la liste des tests ne constituant pas un examen de biologie médicale, dont les tests rapides d’orientation diagnostique (Trod), les députés ont eux conforté leur pratique par des professionnels de santé ou associatifs, ainsi que celle des « autotests », en votant vendredi 10 avril l’article 7 du projet de loi de santé.

La satisfaction du syndicat national des médecins biologistes sera certainement de courte durée. Dans un communiqué du 13 avril dernier, il se félicitait de l’annulation par le Conseil d’Etat de l’arrêté du 11 juin 2013 sur les Trod notamment. Celui-ci aurait été pris selon l’instance à l’issue d’une « procédure irrégulière » par le ministère de la santé. L’arrêté litigieux détermine à la fois la liste des tests ne constituant pas un acte de biologie médicale, les catégories de personnes pouvant réaliser ces tests et les conditions de leur réalisation. Sont visés les tests rapides d’orientation diagnostique du VIH, les « dispositifs destinés par le fabricant à être utilisés comme autodiagnostics », ainsi que plusieurs autres catégories de tests.
Le Conseil d’Etat indique que le code de la santé publique dispose que l’arrêté doit être pris « après avis d’une commission, comportant notamment des professionnels, dont la composition, les conditions de consultation et les attributions sont fixées par décret en Conseil d’Etat ». Or il explique que l’arrêté n’a pas été soumis à l’avis d’une telle commission qui n’a jamais été créée en l’absence de décret.
Un répit de courte durée pour le syndicat qui s’inquiétait de l’irrégularité d’un tel arrêté rendant possible la réalisation par des professionnels autres que les biologistes médicaux d’actes inscrits à la nomenclature de biologie médicale.
En effet, le gouvernement travaille sur un projet d’arrêté modifiant celui du 11 juin 2013 pour y intégrer en plus des Trod du VIH ceux de l’hépatite C qui doivent être mis à disposition prochainement.
Article 7 de la loi de santé
Les députés ont quant à eux voté vendredi 10 avril l’article 7 de la loi de santé qui conforte la pratique des Trod et des autotests pour le dépistage des maladies infectieuses transmissibles, en les ajoutant à la liste des dispositifs de dépistage ne constituant pas un examen de biologie médicale. L’article ouvre la possibilité qu’ils soient pratiqués par des professionnels de santé ou par du personnel de structures de prévention ou associatives. Un arrêté devra fixer cette liste ainsi que les conditions de tels dépistages.
Il prévoit « en raison des évolutions techniques prévues à court et moyen termes en matière de Trod pour les hépatites virales B et C et les infections sexuellement transmissibles […] la possibilité d’un recours aux Trod pour l’ensemble des maladies infectieuses transmissibles », précise l’exposé des motifs de l’article. Il autorise également la mise à disposition d’autotests de détection réalisés directement par les intéressés sans prescription médicale.
Les députés ont également voté des amendements disposant que « le recueil du consentement des titulaires de l’autorité parentale pour la réalisation d’un Trod à un mineur, dans le cadre des conditions définies par cet arrêté, n’est pas requis ». Le mineur peut s’opposer à la connaissance de son état de santé par ses parents. L’article 2 bis étend lui la dérogation à l’obligation d’information et de recueil du consentement parental aux actes médicaux effectués sur les mineurs afin de faciliter les consultations et actes de dépistage et de vaccination, en centres de planning familial, centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles (Ciddist) et dans les consultations de dépistage anonymes et gratuits (CDAG). Le personnel des structures de prévention et associatives est autorisé à réaliser des dépistages par Trod seulement auprès de personnes mineures de 15 ans et plus et dans les départements dont la situation le justifie en terme de santé publique.
Enfin, un amendement précise qu’un professionnel de santé pourra réaliser des Trod dans n’importe quel lieu d’exercice hospitalier ou extrahospitalier, « sans besoin d’une formation particulière », « l’obligation d’une formation initiale adaptée ne concerne que le personnel relevant de structures de prévention et associatives », précise le député Olivier Véran dans l’exposé des motifs de cet amendement.
Dépistage universel
Dans le même temps, la Haute autorité de santé (HAS) a rendu publique jeudi 9 avril une feuille de route intitulée « Réévaluation de la stratégie de dépistage de l’infection par le VIH en France : dépistage en population générale et dépistage ciblé ». Selon la stratégie de dépistage mis en place en 2010, un test de dépistage devait être proposé à l’ensemble des personnes de 15 à 70 ans lors d’un recours au système de soins, en dehors de prises à risque identifiées.
Mais de nouvelles données « incitent à réexaminer l’impact d’une offre de dépistage systématique en population générale et son intérêt en termes de santé publique ». Ce dépistage universel a été peu pratiqué et n’a permis d’identifier qu’un faible nombre de cas en dehors des populations à forte prévalence.
Parallèlement, la HAS estime nécessaire de poursuivre l’évaluation de l’intérêt des Trod et d’évaluer la place des autotests. « Enfin, l’arrivée de Trod, pour le VHC, et potentiellement pour le VHB et la syphilis, nécessite de s’interroger sur la pertinence d’un dépistage combiné du VIH et de ces autres infections ».
Elle a diffusé mercredi 15 avril des documents d’information sur les autotests du VIH qui seront disponibles à partir du 1er juillet 2015. « Ces tests ne sont pas fiables à 100% et tout résultat positif doit être confirmé par un test en laboratoire », rappelle l’agence. De plus, « ils sont peu sensibles en cas d’infection récente (inférieure à trois mois) ».