2015…Des enjeux majeurs pour les professionnels libéraux de santé
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L’observatoire CVM médiforce des professions libérales de santé a présenté hier la 4e édition de son enquête quantitative auprès de 486 professionnels libéraux de santé répartis en 8 professions : pharmaciens, médecins-généralistes, chirurgiens-dentistes, infirmiers, kinésithérapeutes-ostéopathes, vétérinaires, biologistes et radiologues.
Pour la 4ème année consécutive, les professionnels libéraux de santé semblent s’enraciner dans le pessimisme. Ils sont non seulement affectés par le contexte économique, réglementaire et concurrentiel, mais aussi par les évolutions de la relation avec leurs patients. Ils continuent à privilégier la qualité des soins et 6 praticiens sur 10 déclarent avoir pris des mesures pour s’adapter à ces évolutions. L’édition 2015 de l’Observatoire CMV Médiforce des professions libérales de santé fait ressortir ainsi 3 modalités d’adaptation face à leurs patients : un ajustement des honoraires, davantage de technologie, garante d’une plus grande qualité, et une place plus importante accordée à l’échange avec les patients.
Un climat sombre pour les PLS, notamment les biologistes
Pour la première fois, une inquiétante unanimité règne chez tous les PLS : lorsqu’on leur demande de noter la situation actuelle de leur profession, ils s’accordent dans leur ensemble sur une note inférieure à la moyenne, à 4,8/10, alors qu’elle était, l’an dernier encore, à 5,2/10. Lorsque l’on détaille profession par profession, force est de constater que cette note est à la baisse dans les 8 catégories interrogées. Néanmoins, une certaine continuité dans la hiérarchie des notes est à souligner : les infirmiers s’affirment toujours comme les plus positifs et restent au-dessus de la moyenne (5,6) quand les pharmaciens et les biologistes se retrouvent dans leur vision plus négative de la situation (4,2/10).
L’avenir semble plus que morose pour les PLS interviewés, qui accordent dans leur ensemble à la situation de leur profession « dans les années à venir » la note de 3,9 sur 10. Là encore, ce sont les infirmiers qui accordent la note la plus élevée (5/10), tandis que les biologistes montrent leur pessimisme avec une note à 3,5/10. Dans ce climat, nul ne s’étonnera de constater que l’intention de recommander à un jeune l’exercice de sa profession en libéral soit en baisse continue depuis la première édition de cet Observatoire : quand, en 2011, 29% des PLS en moyenne disaient qu’ils ne recommanderaient pas leur profession en libéral, en 2014 ce pourcentage est passé à 53%. Les biologistes apparaissent là encore comme les plus négatifs dans la recommandation de l’exercice libéral, à seulement 28%.
Un contexte économique et réglementaire toujours pesant
Les contraintes économiques soucient toujours autant les praticiens et la hiérarchie de leurspréoccupations ne varie pas d’une année sur l’autre : 97% des PLS placent au 1er rang « les charges et la fiscalité » qui pèsent sur eux, puis viennent les « contraintes administratives » et la « baisse du pouvoir d’achat des Français » (respectivement 94 et 93%), suivies par la baisse de leurs propres revenus (87%).Sur ce point, ce sont les biologistes et les radiologues, qui déclarent pourtant dans cette enquête les plus hauts niveaux de revenus, qui sont les plus nombreux à déclarer une dégradation de leur situation financière.
Dans ce climat peu propice, si l’on demande aux PLS s’ils sont favorables ou non à certains des changements de réglementation envisagés par les pouvoirs publics, un sujet fait l’unanimité contre lui : l’idée de l’ouverture des SEL à des investisseurs non professionnels. 9 praticiens sur 10 y sont opposés. Paradoxalement, les biologistes ne sont pas les plus opposés des PLS à une telle ouverture (84% « seulement » contre 91% en moyenne).
Des évolutions majeures de la société modifient le comportement des patients
Un constat ressort cette année : les patients sont aujourd’hui plus exigeants, car plus informés, plus autonomes et disposant de moins d’argent.Ainsi, si les éditions précédentes de l’Observatoire CMV Médiforce des professions libérales de santé le soulignaient déjà, cette édition le confirme : la crise a un véritable impact sur la demande de soins et rend les patients très sensibles au critère économique. 56% de ces praticiens notent que leurs patients « repoussent certains soins ou traitements pour des raisons économiques » et 23% indiquent que ces derniers sont « plus attentifs au coût des soins proposés, et essayent de négocier ».
La facilitation de l’accès des patients à l’information via Internet n’est pas non plus sans conséquences : les patients s’informent de plus en plus par eux-mêmes sur leurs maladies (un constat fait par 90% des praticiens) et 86% des PLS soulignent que désormais les patients « ont de plus en plus une opinion sur les traitements et les médicaments ». Les biologistes constatent que leurs patients leur demandent plus d’explications qu’avant sur les résultats de leurs examens (17%).
Plus des trois-quarts des PLS se rejoignent pour constater que « la crise économique les rend plus attentifs à leurs dépenses de santé », que « les gens n’hésitent plus à consulter plusieurs médecins », ou que « les patients se comportent de plus en plus comme des clients ». Si, parfois, il en résulte de l’impolitesse, voire une relative agressivité, une tendance de fond semble se dégager : les patients souhaitent désormais être acteurs de leur santé.
Des professionnels libéraux de santé qui s’adaptent en conséquence
Pour 56% des biologistes, ce changement de comportements des patients n’est ni bon ni mauvais mais nécessite une adaptation de la part des professionnels.Face à ce constat, 63% des praticiens reconnaissent qu’ils s’adaptent. Chez les biologistes, ils ne sont que 59% le faire. Mais comment ? Cette édition de l’Observatoire fait ressortir 3 grands axes d’adaptation :- celle-ci peut passer par une baisse des prix, évoquée plus particulièrement par les chirurgiens-dentistes, les vétérinaires et les pharmaciens mais par un seul biologiste ;- par davantage de technologie et de « modernisation » (c’est le cas pour les chirurgiens-dentistes et les radiologues) ou de « qualité » (évoqué par les biologistes), nouvelle obligation donnée à leur profession dans le cadre des politiques d’accréditation;- mais aussi par davantage de dialogue et d’écoute, donc par une place plus importante accordée au « conseil » et à l’échange, une évolution soulignée par l’ensemble des PLS. Dans ce cadre, les biologistes sont les seuls à évoquer l’utilisation d’Internet comme moyen de s’adapter aux attentes nouvelles des patients (sites internet, transmission plus rapide des résultats par internet).
Enfin, une autre solution est avancée par les professionnels libéraux interrogés, afin d’être mieux « armés » face aux évolutions de leurs patients et de la médecine : s’ils sont de moins en moins nombreux à recommander leur métier à un jeune en libéral, ils sont en revanche de plus en plus à exprimer leur préférence pour des modes d’exercice moins « solitaires » à l’avenir (en cabinet avec des confrères, en maison de santé ou en tant que salariés) avec une nette tendance à la volonté de regroupement et de mutualisation à l’avenir, sauf chez les biologistes et les radiologues. Peut-être parce que l’arrivée de grands groupes risquerait de remettre en cause les positions acquises et par conséquent leurs revenus ? Les biologistes s’expriment spontanément pour pointer du doigt la financiarisation excessive de leur profession.
« Dans ce contexte de crise, nous sommes face à des professionnels qui sont prêts à s’adapter, qui restent ouverts. Face au vieillissement de la population, les PLS ne devraient pourtant pas se focaliser sur une vision trop pessimiste, le besoin de soin ne peut que s’accroître. Il faut néanmoins comprendre leurs craintes face à la déréglementation, la peur d’une certaine liberté d’exercice dans un contexte où les dépenses doivent être encadrées et mieux réparties. Les PLS vont-ils continuer d’investir ? Pour le moment, les investissements sont stables, dans un climat favorable avec des taux historiquement bas, » a déclaré Ariane Govignon, directrice générale de CMV Médiforce.
http://www.cmvmediforce.fr/