Diabète : un vrai potentiel d’amélioration du suivi des patients
Les recommandations de la HAS dans le cadre du diabète sont peu suivies par les praticiens, selon une étude menée en collaboration par le laboratoire Bio86, et les sociétés ISoft et Sil-Lab Expert.
Ce travail a été réalisée à partir de la base de données du groupement de laboratoire Bio86 à Poitier, sur les informations patients anonymisées de 2012 à 2018, grâce à un outil d’analyse de données développé en partenariat par les sociétés ISoft et SIL-LAB expert. « Nous avions une bonne volumétrie de données pour une analyse robuste sur le diabète » témoigne Jean–Philippe Meyniel, d’ISoft lors d’un webinar de présentation du projet organisé le 23 septembre 2021. De fait, les données de 449 754 patients et 930 médecins prescripteurs étaient disponibles pour l’analyse. « Les laboratoires Bio86 ont un quasi-monopole sur leur département ce qui permet une bonne interprétation des résultats. Mais à terme pour ce type d’études, il faudra avoir accès au DMP (Dossier Médical Partagé) pour pouvoir suivre un patient sur plusieurs laboratoires » précise Serge Payeur, président de la société de conseil en stratégie digitale Sil-Lab expert.
La µAlbuminurie souvent négligée
Ces données ont donc permis de reconstruire l’historique des analyses médicales de chaque patient, et d’établir un profil de prescription, en fonction de la spécialité du praticien. « Ces profils de prescription varient en fonction de la spécialité, mais sont constants dans le temps. Ce sont les endocrinologues qui respectent le mieux les recommandations de la HAS » constate Jean–Philippe Meyniel. Pour rappel, selon ces recommandations, la HAS recommande de pratiquer chaque année pour le suivi des patients diabétiques, un examen de glycémie à jeun, de créatinémie, de cholestérolémie, de triglycéridémie et de microalbuminurie, et quatre dosages de l’hémoglobine glyquée (HbA1c). Cette étude montre que les endocrinologues respectent à peu près le ratio 4 :1 HbA1c versus les autres examens. En revanche, une légère sous-prescription de la glycémie et de la µAlbuminurie et une légère sur-prescription de la créatinémie, de la cholestérolémie et de la triglycéridémie sont observées, en comparaison avec les recommandations de la HAS pour le suivi des patients diabétiques. En ce qui concerne les médecins généralistes, les plus représentés dans l’étude, une sous-prescription du Hba1c et de la µAlbuminurie ressort, ainsi qu’une prescription aléatoire de créatinémie, de la glycémie, de la cholestérolémie et de la triglycéridémie. Enfin, chez les cardiologues, la µAlbuminurie n’est quasiment pas prescrite, et la prescription des autres examens est aléatoire. « La µAlbuminurie est l’examen le plus souvent négligé » observe Jean–Philippe Meyniel.
Un manque à gagner d’environ 280 k€ par an
Et ces constats ont un réel impact financier : « toutes spécialités médicales confondues, le non-respect des recommandations de la HAS peut générer un manque à gagner d’environ 280 k€ par an pour une seule pathologie, ce qui représente pour le laboratoire Bio86 une perte de 1% du CA » précise Jean–Philippe Meyniel.
En conclusion, « il y a un vrai potentiel pour améliorer les pratiques professionnelles » affirme Bruno Gauthier, biologiste au laboratoire Bio86. « Par exemple, à l’heure actuelle, il n’existe pas d’outils qui regrouperait toutes les recommandations en mode push pour les médecins. Le Ségur du numérique va grandement faciliter l’exploitation des données, en particulier via la mise en place de la codification Loinc. Cela facilitera la mise en place d’outils pour améliorer le parcours de soin du patient » projette-t-il.